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Coaching

Développer une posture de gestionnaire-coach

| Mis à jour le 2 décembre 2024

Dans un contexte de pénurie de main d’œuvre, quand les sondages démontrent que :

  • les employés songent à quitter leur emploi parce qu’ils ont le sentiment de ne pas avoir été suffisamment soutenus par leur employeur et que celui-ci n’a pas été assez agile et compréhensif face à des situations particulières,
  • et que de leur côté, les gestionnaires envisagent d’abandonner complètement le domaine de la gestion parce qu’ils ont l’impression qu’ils n’en font jamais assez,

il devient urgent de trouver un antidote pour favoriser le bien-être et la rétention des effectifs. La posture de leadership appelée « gestionnaire-coach » est une piste de solution.

Le balado Profession Gestionnaires est une initiative de l’Ordre des administrateurs agréés du Québec (Adm.A.).

La posture de gestionnaire-coach

La solution n’est pas que tous les gestionnaires deviennent des coachs professionnels, ni qu’ils fassent du coaching avec leurs équipes mais plutôt qu’ils s’inspirent de la posture du coach certifié et qu’ils tendent à lui emprunter sa capacité à créer un climat de confiance, de respect et de sécurité psychologique, sa qualité de présence, son intelligence émotionnelle et certains de ses outils de communication.

Les outils de communication du coach professionnel

Parmi les outils les plus employés par le coach professionnel, on retrouve :

  • l’écoute active : qui permet de connecter à l’autre et de rebondir sur ce qu’il nous dit réellement. C’est la capacité d’accueillir l’autre, d’écouter avec ouverture et curiosité, sans jugement, pour comprendre son point de vue plutôt que pour prendre le problème sur ses épaules, trouver une solution ou se justifier, se défendre. Écouter activement, c’est écouter entre les lignes, les non-dits, écouter aussi avec ses yeux pour reconnaître et être sensible aux signes de stress ou d’émotion chez son interlocuteur.
  • le questionnement puissant : il s’agit de poser des questions ouvertes - qui ne se répondent pas par oui ou non - et qui vont plutôt aider l’autre à réfléchir, à faire des prises de conscience qui vont lui permettre de trouver de nouvelles solutions, dans un espace de conversation naturelle. Par exemple, en formulant la question en débutant par « Qu’est-ce que…. ? » plutôt que par « Est-ce que… ? ».

Favoriser la responsabilisation

Les questions ouvertes favorisent le développement de l’autonomie et de la responsabilisation. Par exemple, demander à son collaborateur d’annoncer à l’avance le résultat qu’il souhaite au terme d’une rencontre et le type d’aide attendue.

Pendant la rencontre, plutôt que de poser des questions qui se répondent par oui/non et qui ont l’air d’un interrogatoire (As-tu fini tel dossier ? As-tu essayé telle chose ?), le leader-coach va poser des questions ouvertes : « Parle-moi de l’état d’avancement du dossier ? Qu’est-ce que tu as essayé jusqu’à présent ? Qu’est-ce qui fait que ça ne fonctionne pas selon toi ? Qu’est-ce que tu as besoin d’apprendre ? ».

En fin de rencontre, le leader-coach va s’assurer que l’autre a bien compris le mandat et qu’il quitte dans un état de motivation. Par exemple, en demandant : « Quelles sont les premières étapes auxquelles tu penses ? Quels sont les obstacles que tu envisages ? Quelles conditions aurais-tu besoin de mettre en place pour réussir ? De quelle façon puis-je te soutenir ? ».

Gestionnaire-coach, une posture pérenne qui comporte plusieurs avantages

Le monde du travail vit une transformation accélérée. La posture de leader-coach n’est donc pas un effet de mode mais une façon de s’adapter efficacement aux nouvelles réalités du marché et aux besoins des travailleurs.

Les nouvelles générations de travailleurs attendent de leur patron des conversations franches. Ils veulent qu’on leur disent clairement - avec respect et bienveillance - ce qui est attendu, ce qui ne va pas : ils veulent avoir des occasions de se développer et être accompagnés dans ce processus. Dans ce contexte, la posture de leader-coach – celui qui communique habilement - devient un gros avantage pour l’attraction, la rétention et le développement des talents. En même temps, pour certains gestionnaires qui n’ont pas été guidés de cette façon, il peut être déstabilisant de donner ce que certains appellent encore du « feed-back négatif », que l’on devrait plutôt appeler « rétroaction axée sur le changement ». Il y a des façons de tenir des conversations à la fois courageuses et constructives, avec des caractéristiques qui ont été mise en évidence dans la recherche. La théorie de l’autodétermination met notamment en lumière trois leviers de la motivation, trois besoins fondamentaux chez les travailleurs : l’autonomie, le sentiment de compétence et le lien social. Tenir compte de ces besoins dans la façon de formuler la rétroaction est donc une façon de s’assurer de soutenir la motivation et le mieux-être. La prévention en matière de santé psychologique et bien-être au travail et aussi l’accompagnement dans les cas de retour après un arrêt de travail exigent du doigté.

Coach plutôt que sauveur

Quand on questionne les équipes de travail, on découvre que jusqu’à 60 % du temps se passe dans des situations qui se jouent à l’intérieur de ce qu’on appelle le « triangle dramatique », dans lequel on peut adopter – parfois à notre insu - les rôles de bourreau, sauveur, victime. Le terrain de jeu idéal pour les malentendus et les débordements d’émotions. L’antidote à la posture de sauveur est la posture coach. En passant d’une posture à l’autre, l’attitude du leader peut inviter ses interlocuteurs à se réajuster et à se parler « d’adulte à adulte ». Cette attitude peut contribuer à prévenir la perception de harcèlement psychologique. Dans les faits, plusieurs plaintes en harcèlement sont non fondées parce qu’il s’agit en fait de situations impliquant des communications maladroites et des incivilités plutôt que du harcèlement à proprement parler. Les gens sont de plus en plus sensibles aux mots, on parle beaucoup de « micro agressions », et en même temps, on manque souvent d’outils pour avoir des dialogues authentiques et respectueux.

Leader-coach : une posture à ajouter à sa palette

À l’heure actuelle, il devient nécessaire de définir de nouvelles règles (on pense à des politiques sur le télétravail, le mode hybride, l’utilisation des médias sociaux, le droit à la déconnection, la prévention des incivilités et du harcèlement, la prévention en matière de santé et bien -être, la gestion des risques psychosociaux, etc.) et on se rend compte que le « one size fits all », la solution unique, s’applique plus difficilement. Le gestionnaire ne peut plus écrire une politique tout seul dans son bureau. Il devient judicieux d’apprendre à aller questionner les gens pour comprendre leur perception, leur situation, leurs besoins et aussi entendre leurs pistes de solutions. Au-delà de la reconnaissance (dire merci), les gens ont maintenant soif de considération (prise en compte de leur contexte, de leurs valeurs et opinions, etc.).

Grâce à la recherche, on sait maintenant qu’il est impossible d’augmenter la productivité d’un individu stressé et que sous pression, la motivation sera de courte durée. Stratégiquement, il devient donc très important de découvrir et de comprendre ce qui stresse les gens – c’est personnel car ça relève de l’interprétation - afin de trouver ensemble des stratégies pour réduire le stress à la source. L’acronyme CINÉ nous permet de garder en mémoire les quatre déclencheurs du stress chez l’être humain. Ainsi, on pourrait sonder les équipes pour comprendre les situations dans lesquelles les gens ont l’impression d’avoir peu de Contrôle, trop d’Imprévus, trop de Nouveauté, de choses à apprendre, ou encore que leur Égo est menacé (leur réputation, leur emploi, leurs valeurs). Et on pourrait bien sûr obtenir des résultats différents selon les départements, qui vont entraîner des solutions différentes.

Des pistes à explorer

La théorie de l’autodétermination : qui nous indique que trois besoins essentiels pour se sentir bien, engagé et motivé au travail sont :

  • l’autonomie : l’impression d’avoir une certaine marge de manœuvre à l’intérieur du cadre prescrit, permettant d’exécuter des tâches en accord avec ses valeurs (ex : horaire flexible, télétravail, etc.);
  • le sentiment de compétence : l’impression d’avoir à la fois les ressources internes (connaissances, compétences, etc.) et les ressources externes (budget, matériel, échéancier raisonnable, soutien, etc.) pour atteindre les objectifs fixés;
  • l’affiliation sociale, le fait de sentir que l’on fait partie d’un groupe qui compte sur nous et que de qui l’on bénéficier de son soutien.

Le gestionnaire-coach a donc avantage à tenir compte de ces trois éléments dans l’organisation du travail, la façon d’exprimer de la reconnaissance et de la rétroaction afin de soutenir la motivation, le bien-être et l’engagement. Par exemple, le lien sociale a été identifié dans la littérature scientifique comme étant le facteur de protection le plus important pour assurer la cohésion et la santé de l’équipe quand « il vente fort » et au contraire, si on néglige de se préoccuper de ces mêmes éléments, ils deviennent des facteurs de risque et le gestionnaire va réaliser qu’il navigue sur un radeau en plein océan quand la tempête va arriver…

L’évaluation des risque psycho sociaux est également une avenue empruntée puisqu’il s’agit maintenant d’une obligation de l’employeur en vertu de la nouvelle mouture de la Loi sur la santé et sécurité au travail (LSST).

Comment développer la posture de leader-coach ?

Par du travail sur soi notamment en développant l’intelligence émotionnelle, le leadership et en nourrissant l’estime de soi. La perfection, n’est pas une qualité de l’être humain, il faut plutôt tendre vers l’excellence et accueillir l’erreur comme un espace de développement, pour soi et pour l’autre.

Quand l’estime de soi est fluctuante ou que le gestionnaire a un côté « sauveur », il est très souvent sensible à la critique : il a tendance à se remettre en cause au lieu de remettre des choses en question.

Lorsqu’on se remet en cause, on a vite le syndrome de l’imposteur, on est persuadé qu’on n’est pas la personne de la situation. Le leader plus solide est capable de questionner, de comprendre, de remettre en question les façons de faire, dans un processus d’amélioration, de développement, sans jeter le bébé avec l’eau du bain.

Pour être accompagné.e et obtenir du soutien

Les approches « dialogiques » (ex : coaching individuel, groupes de codéveloppement professionnel) sont celles qui semblent le plus efficaces auprès des adultes et qui sont d’ailleurs de plus en plus reconnues par les ordres professionnels dans les programmes de formation continue obligatoire.

Ce sont des approches qui permettent à la fois de bénéficier du modèle d’un coach et de pratiquer au bon moment, d’apprendre dans l’action pour développer ses habiletés de communication, la gestion des émotions, l’innovation, tout en bénéficiant de l’accompagnement d’un partenaire privilégié dans le cas du coaching ou du support d’un groupe de pairs dans le cas du codéveloppement.

Étant donné qu’il s’agit d’un domaine non réglementé, je vous invite à travailler avec des personnes et des organisations reconnues. Par exemple, il existe une Fédération internationale de coaching , l’ICF, qui fonctionne avec des mécanismes semblables à celui d’un ordre professionnel : accréditation des programmes de formation, examens d’entrée, code de déontologie, formation continue obligatoire, etc. Au Québec, les coachs adhèrent à l’ICF sur une base volontaire, ce qui témoigne de leur posture « professionnelle ». Pour le codéveloppement, une approche développée au Québec, il y a l’Association Québécoise de Codéveloppement professionnel (AQCP) qui forme les facilitateurs de groupe, selon les règles de l’art et les résultats de la recherche.

De plus en plus d’entreprises et d’organisations exigent d’ailleurs que les consultants qu’ils engagent détiennent les certifications de l’ICF et de l’AQCP.

Références et liens utiles

  • International Coaching Federation (ICF)
  • ICF-Qc, sections « Trouver un coach » et « Vérifier un membre »
  • Association Québécoise de Codéveloppement Professionnel (AQCP)
  • Formation « Agir en Leader-Coach »
  • Loi sur la santé et sécurité au travail (LSST), risques psychosociaux
  • FOREST, Jacques et collaborateurs (2022). Libérer la motivation avec la théorie de l’autodétermination, Édito
  • LUPIEN, Sonia (2020). Par amour du stress, Éditions Va Savoir.

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