Lorsque les sujets sont sensibles, que les situations sont tendues ou encore, qu’une conversation courageuse s’impose, il est important de se sentir outillé.e pour s’exprimer de façon constructive et respectueuse. C’est Marshall B. Rosenberg qui a développé une approche de communication non violente (CNV) qui est maintenant aussi appelée communication bienveillante ou communication consciente. Pour découvrir les quatre étapes de ce type de communication, écoutez la vidéo :
« S’initier à la communication consciente et bienveillante en quatre étapes » (durée : 4 :19 minutes)
Des besoins légitimes à combler
S’exprimer, c’est avant tout parler de soi, de ses propres besoins. Même quand la personne devant moi semble m’accuser, elle me parle en fait de ses besoins non comblés. Ce qui nous fait réagir dans une conversation difficile est donc la manifestation de nos propres besoins non satisfaits, au-delà de la manière de faire et des mots employés par l’autre. Il s’agit-là d’un élément-clé, car les émotions désagréables sont en fait un signal pour attirer notre attention sur ce qui est important : nos besoins légitimes, nos valeurs.
Avoir une intention pour préserver la relation
Ce qu’il faut garder en tête, c’est que tout est une affaire de perception : ça dépend du point de vue! Avant d’avoir la conversation difficile, il est primordial de se donner une intention bienveillante et constructive : quelle est la qualité du lien que je veux établir avec l’autre, autant quand je m’exprime que quand je l’écoute? De quelle façon j’aimerais que l’autre se sente après notre échange? Et moi? Quel est le message principal à retenir?
Quatre étapes simples : OSBD
Selon Marshall B. Rosenberg, voici une façon d’aborder simplement l’échange :
Observation des faits
Il s’agit d’identifier un fait neutre – sans interprétation – sur lequel attirer l’attention de l’interlocuteur et avec lequel l’autre sera d’accord.
Par exemple, on pourrait débuter la phrase par : « Quand je vois que ou je constate que… ».
Attention ! « Tu arrives toujours en retard ! » comporte sûrement un peu d’exagération et peut être perçu comme une attaque, un blâme (qui déclenche une réponse de stress) alors que « J’ai remarqué que tu arrives après 10h00 depuis 2 jours » est probablement plus précis.
Sentiment ressenti
Il s’agit de partager simplement avec l’autre comment on se sent en lien avec le fait identifié, en assumant ce que l’on ressent et qui est en lien avec notre propre histoire, sans en tenir l’autre responsable. Par exemple, on évitera les expressions comme « Je me sens incompris ou non respecté » ou « Tu me fais sentir coupable » au profit de mots plus précis comme « Je suis préoccupé, stressé, frustré, inquiet, déçu, etc. ».
Besoin légitime
Ici, l’intention est de donner du sens, d’aider l’autre à comprendre ce qui est fondamental pour nous. Il faut distinguer un désir - une envie passagère, une pulsion- comme manger un gâteau ou acheter une nouvelle paire de souliers, d’un besoin réel et légitime : sécurité, repos, respect, autonomie, relation, authenticité, d’accomplissement, etc. Les besoins étant souvent très proches des valeurs auxquelles on croit de façon fondamentale. Cet aspect pourrait donc débuter par une phrase comme : « C’est important pour moi parce que j’ai besoin de … », par exemple.
Demande concrète
Lors d’une communication de ce type, le but ultime est de trouver une voie de passage commune afin d’améliorer la situation. Cette dernière étape est donc très importante et ne doit pas être escamotée. Des questions comme : « Dans ce contexte, serais-tu d’accord pour…. ? » ou « Qu’en penses-tu ? » invitent l’autre personne à s’exprimer à son tour.
Une recette somme toute assez simple sur papier mais qui demande réflexion et préparation.
Pour soutenir l’autre
Puisque tous ne sont pas familiers avec cette approche, il est aussi possible d’influencer stratégiquement le cours d’une conversation en utilisant les quatre étapes mentionnées plus haut sous forme de questions. Par exemple :
- Faits neutres : Au lieu de laisser la conversation débuter sur des ouïes-dire ou des perceptions, on pourrait demander doucement à la personne : « Pour que je comprenne bien ce dont tu me parles, peux-tu me donner un exemple concret ? »
- Sentiment : Puisque les émotions sont souvent un sujet tabou, il est souvent ardu de mettre un mot précis sur ce que l’on ressent. On peut donc offrir à l’autre un reflet : « Je te sens stressé » (ou déçu ou fâché… selon la situation). Même si le mot choisi n’est pas tout à fait exact – notre interlocuteur pourra préciser au besoin – cette approche permet à l’autre de se sentir reconnu et validé. On pourrait aussi demander : « C’est une situation complexe, qu’est-ce que ça te fait vivre ? », sans chercher à interpréter à la place de l’autre.
- Le besoin : Il est parfois difficile d’exprimer clairement le besoin auquel on cherche à répondre. Des questions comme : « Qu’est-ce qui est le plus important pour toi ? » ou « Explique-moi ce que tu cherches à préserver » ou « Qu’est-ce qui pourrait arriver de pire selon toi et que tu veux éviter ? » peuvent faire progresser la conversation vers ce qui est le plus important.
- La demande : Finalement, demander : « Qu’est-ce que tu souhaites ? » ou « De quelle façon puis-je te soutenir ? » est une façon d’amener la personne à se responsabiliser et à formuler une demande claire.
L’intelligence émotionnelle à la rescousse !
Faire preuve d’intelligence émotionnelle, ça commence par être au clair avec soi-même : qui suis-je, quelles sont mes valeurs, la conscience de ses propres besoins, etc. afin d’être en mesure de les exprimer clairement et simplement. Cette connaissance de soi permet de se gérer plus efficacement en toutes circonstances. Une fois ces deux étapes développées, il devient alors possible d’être présent à l’autre et de l’accueillir avec curiosité et bienveillance, sans jugement, sans se sentir automatiquement attaqué. C’est à ce moment que la communication consciente devient possible. Soyons indulgents envers nous-même et les uns envers les autres : ça prend de la pratique!
Références
- ROSENBERG, Marshall B. (2005). Les mots sont des fenêtres ou bien ils sont des murs
- le tableau des émotions et des besoins préparé par le groupe Consciencia est un outil pratique pour trouver les bons mots pour mieux comprendre et exprimer ce que l’on ressent